Quatre idées reçues pourtant rassurantes pour finalement inquiéter les élus en en matière de lutte contre les pollutions et les déchets.

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Quatre idées reçues pourtant rassurantes pour finalement inquiéter les élus en en matière de lutte contre les pollutions et les déchets[1].

Par

Manuel GROS

Professeur  émérite des facultés de droit

Avocat au barreau de Lille

L’idée première était de  rassurer les élus et même les agents au regard des  responsabilités potentielles en matière de lutte contre les pollutions  et les déchets, autour de quelques fondamentaux simples permettant, en cette matière, de relativiser le risque de condamnation.

Comme cela arrive parfois, un point de départ rassurant peut in fine révéler des inquiétudes  fondées.

Déjà, pour être clair, on rappellera qu’il n’existe pas une responsabilité en la matière, mais des responsabilités, à raison de notre système juridique de responsabilité, qui distingue d’une part la responsabilité pénale, fondée elle-même sur la commission d’un délit, infraction pénale reconnue par le Code pénal, et dans laquelle la société entend réprimer un comportement, et d’autre part la responsabilité « civile » au sens large, où une victime d’un préjudice veut obtenir réparation de ce dommage.

Au sein de cette dernière (responsabilité civile ou patrimoniale), il convient également de distinguer les procédures, les juridictions, et -les fondements étant différents- la responsabilité dite « contractuelle »  qui est constituée par le non-respect d’une obligation résultant d’un contrat par l’une des parties, de la responsabilité « extracontractuelle », qualifiée parfois de « quasi délictuelle », voire de « délictuelle », fondée elle sur un simple comportement, une faute.

Mais même dans ce cadre de la responsabilité « civile » au sens large, il convient, dans le système juridique français, tel qu’il résulte de la Révolution française, de distinguer la responsabilité civile devant les juridictions judiciaires et la responsabilité administrative – pourtant « civile » dans son fondement- devant les juridictions administratives.

On ne traitera également que des obligations et des responsabilités en matière de lutte contre les pollutions et les déchets, mais seulement des obligations et responsabilités des élus et plus indirectement des agents publics.

Or le plus souvent, à l’origine d’une infraction pénale (responsabilité pénale) ou d’un préjudice (responsabilité civile) il y a souvent une autre personne que l’élu (celui qui est à l’origine du déchet (constructeurs, démolisseurs, aménageur, industriels…) ou encore celui qui est à l’origine du dépôt du stockage du déchet (les mêmes et en outre tous les anonymes qui déposent n’importent où des déchets).

Précisément parce que la responsabilité d’un élu dépend des compétences qui lui sont attribuées (un élu ne devrait pas pouvoir être responsable de quelque chose dont il n’a pas la compétence), il est essentiel de parler aussi des obligations des élus puisque celle-ci vont déterminer les responsabilités de ces derniers, d’où la combinaison dans la présente contribution des obligations et responsabilités des élus matière de lutte contre les déchets.

A première vue l’on devrait pouvoir  rassurer, de tranquilliser les élus, tant sur le plan pénal (à titre personnel) que sur le plan civil au sens large (constitution de partie civile et responsabilité administrative), mais l’honnêteté intellectuelle et  l’évolution de notre société produisent à la vérité l’effet inverse.

 

Il faut donc relativiser les éléments théoriques rassurants au pénal comme au civil (au sens large), à la lumières des pratiques textuelles et jurisprudentielles, malgré les idées reçues rassurante.

 

Une apparente tranquillité personnelle théorique en matière pénale dans le cadre de la lutte contre la pollution et les déchets.

 

La responsabilité pénale des élus pourrait paraître limitée faute d’infraction pénale spécifique à la lutte contre la pollution  de même que la liaison entre compétences et responsabilités pourraient rassurer nos élus, dans un exercice rigoureux des compétences strictes dont ils ont la charge.

 

Une responsabilité pénale apparemment difficilement applicable, faute d’infraction pénale spécifique ?

 

Une première idée reçue rassurante pour nous serait l’absence d’infraction pénale spécifique à la lutte contre la pollution et les déchets. En effet, s’il existe des infractions pénales commises par les exploitants ou les déposants, infractions qui sont visées par le code de l’environnement, en revanche il n'existe pas d’infraction pénale spécifique de l’autorité de police.

Or, en droit pénal, le principe de légalité des délits et des peines impose qu’on ne peut être condamné pénalement qu’en vertu d’un texte pénal précis et clair (en vertu de l’adage, nullum crimen, nulla pœna sine lege[1]).

Il est vrai que si selon l’article L 121-3, alinéa 1er du Code pénal, « il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre », cet article précise également en son 2e alinéa « toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui », et l’on imagine mal la satisfaction de cet élément intentionnel (délibéré) pour des élus.

Mais en cherchant davantage, au sens de l’alinéa 3 « il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ».[2]

Le texte précise même, à l’alinéa 4 que « dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ».

 

Le précédent de la Faute sur Mer en 2010 a montré que l’appréciation des juges, lorsque l’action ou l’inaction des élus responsables ont été causes de décès, leur a permis de considérer que la responsabilité pénale s’appliquait.

C’est ainsi qu’il existe deux délits majeurs susceptibles d’être constitués pour un maire (ou un élu responsable) dans l’exercice de ses fonctions, celui d’homicide involontaire (article 221-6 du code pénal[3]) est encore plus large celui de mise en danger d’autrui (article 223-1[4]).

Jusqu’à présent, il n’ont été retenus qu’à de rares occasions par des mises en examen ou des condamnations frappant des élus locaux ou des autorités préfectorales, même si des condamnations ont pu être prononcées dans des affaires très médiatisées, comme l’incendie du dancing le « Cinq-sept » de Saint-Laurent-du-Pont (1970 146 morts), la catastrophe des thermes de Barbotan (1991 20 morts), les inondations de Vaison-la-Romaine (1992 37 morts), l’effondrement du stade de Furiani (1992 , 18 morts et 2357 blessés), le drame du DRAC (1995 7 morts)..

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Cela s’est vu cependant en matière environnementale au sens large avec par exemple la condamnation à une amende d’un maire qui avait laissé se déverser des rejets de purin dans les eaux[5]  à une peine de prison de deux ans avec sursis avec amende pour le maire d’une  commune d’Ile et Vilaine pour inaction alors qu’il y avait eu une pollution des eaux[6] .

Le facteur « eau » a donc très vite été important, car comme on le sait, l’eau est l’un des éléments les plus meurtriers en cas de dérèglements (crues, inondations, tsunamis… )  et concernent en tous les cas toutes les collectivités territoriales du littoral marin et des voies d’eau naturelles ou artificielles.

 Or si le déchet est rarement  intrinsèquement à l’origine d’un décès, ou même d’une mise en danger de la vie d’autrui, associé à l’eau (qu’il retient), il peut être un facteur aggravant d’inondation.

Ainsi  l’inondation est cause de décès et de graves atteintes aux biens.

Très récemment, les inondations du Var et de l’Aude de 2018 ont révélé les dangers de la combinaison des dépôts de déchets et de grandes masses d’eau en mouvement : les déchets, végétaux[7] ou autres, les ordures, ménagères ou industrielles, les immondices de toutes sortes accumulés par exemple le long d’un cours d’eau, ont pu, en cas de montée des eaux et de crue, multiplier dans des proportions considérables les ravages provoqués par les flots en aggravant la force du courant, en attaquant très violemment les ouvrages d’art, les ponts, les barrages, les écluses, les digues, en bouchant des évacuations prévues,… 

La célèbre affaire de la Faute sur mer, par son extrême gravité, a révélé à la France des élus que le risque pénal était une réalité.

Dans la nuit du 27 au 28 février 2010, la tempête Xynthia avait frappé l'ouest de la France, faisant 47 morts, dont 29 personnes uniquement sur la commune de La Faute-sur-mer, en Vendée.   Le TGI des Sables d’Olonne, lors du premier procès en septembre 2014, avait  condamné le maire de La Faute-sur-Mer de 1989 à 2014, à quatre ans de prison ferme pour homicides involontaires (12 décembre 2014). Certes la Cour d’appel de Poitiers (4 avril 2016) avait fortement réduit la peine en appel a deux ans de prison avec sursis, tandis que son ancienne adjointe à l'urbanisme, l’agent immobilier et fils de cette dernière, étaient relaxés, tout comme deux sociétés de BTP poursuivies. La cour d'appel "reconnaît l'honnêteté de M. Marratier, reconnaît le fait qu'il n'a pas voulu ces morts (...)" et "retient une responsabilité parce qu'il n'a pas compris, il n'a pas entendu les alertes qu'il a pu avoir". Ainsi l'ancien maire de La Faute-sur-Mer a été condamné en raison de sa mauvaise gestion du risque et des secours pour ses administrés mais la cour a décidé de le relaxer, ainsi que les autres prévenus, pour la délivrance de permis de construire en zone inondable.[8] Selon l'arrêt, les élus n'ont commis "ni fautes, ni manquements", et n'étaient pas "responsables des errements des services préfectoraux". 

En tous les cas avec le dérèglement climatique, à l’imperméabilisation des surfaces, et le cycle de tempête que nous connaissons, la responsabilité pénale des élus n’est plus une question exclusivement théorique.

 

Une responsabilité pénale apparemment circonscrite au lien entre compétences et responsabilités.

 

Autre idée reçue, celle selon laquelle chaque élu devrait pouvoir circonscrire les potentialités de sa responsabilité en fonction des compétences qu’il exerce et pouvoir estimer à l’abri de tout risque pénal dès lors qu’il exerce correctement les seules compétences qui lui sont dévolues. Selon l’expression connue du capitaine Haddock[9] cette question est en réalité « simple et compliquée à la fois ».

Un très grand nombre d’incertitudes sémantiques  et juridique ne permettent plus à notre sens de circonscrire la responsabilité pénale au seul domaine précis de compétences de tel ou tel.

Déjà les concepts  même de déchet et de décharge ne sont pas si simples : si le concept de déchet et défini par la loi mais de façon tellement large qu’on ne peut circonscrire sa consistance[10], de sorte tout ce qui est abandonné par principe est un déchet,  la notion de décharge « sauvage » (ou dépôts sauvages) n’est pas réellement définie par la loi. C’est donc la doctrine qui y voie un dépôt de déchets constitués sans autorisation.

La distinction est donc plus compliquée que subtile, surtout que s’y ajoute celle  entre le dépôt « sauvage» ( qui relève de la compétence du Maire), qui est un site ponctuel qui résulte le plus souvent d’apports illégaux a réalisé par des particuliers des artisans ou des entreprises pour se débarrasser de leurs déchets à moindre coût et les « décharges non autorisées » , qui sont des sites le plus souvent « historiques», mais qui font encore l’objet d’apports réguliers de déchets, et qui fonctionnent « de fait » sans autorisation préfectorale (DDTM s’il s’agit de déchets « inertes », DREAL si c’est sous le régime des ICPE mais en  tous les cas de la compétence de l’Etat).

À ces difficultés de détermination de compétences matérielles s’ajoutent celles, plus juridiques, entre les différentes polices spéciales.

Ainsi, l’article L 541-3 code de l’environnement montre une compétence partagée entre le maire et l’Etat et évoque d’ailleurs «  l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente [11]», à charge pour l’exploitant, la victime, ou le juge de déterminer cette dernière.

La même complexité aggravée par les règles de substitution existe en termes de police générale : on sait en effet que l’autorité de police naturelle locale de police générale est le maire au titre des articles L 2212-1 et 2 du code général des collectivités territoriales, en ce que la police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment «  le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire… [12]» et « le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, (…)[13]

Le fait est que le préfet a toujours une obligation de substitution en cas de carence.

Cela est vrai pour l’exercice de la police générale (L 2212-5 code général des collectivités territoriales[14] ), mais aussi pour celui des polices spéciales, cette fois sur un fondement jurisprudentiel (« qu'à ce titre, l'article L. 541-3 confère à l'autorité investie des pouvoirs de police municipale la compétence pour prendre les mesures nécessaires pour assurer l'élimination des déchets dont l'abandon, le dépôt ou le traitement présentent de tels dangers ; que ces dispositions ne font toutefois pas obstacle à ce que le préfet, d'une part, en cas de carence de l'autorité municipale dans l'exercice des pouvoirs de police qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, prenne sur le fondement de celle-ci, à l'égard du producteur ou du détenteur des déchets(…)[15].

L’inter communalisation ne change rien au problème, sinon en le compliquant, les responsabilités « matérielles » des maires ou de leur délégataire, passant aux exécutants intercommunaux dans l’exercice des nouvelles compétences.

 

En résumant, tout le monde peut être responsable soit par compétence d’attribution (polices spéciales des uns et des autres) soit par « clause générale de compétence » en matière de police (police générale), soit par substitution (Préfet).

De la sorte et en d’autres termes, un maire ne pourra plus se rassurer pénalement en estimant que telle ou telle police spéciale n’est pas (ou plus) de sa compétence, alors que son pouvoir de police générale continue de lui donner les moyens de prendre des mesures, comme le préfet, autorité permanente de substitution de toutes les polices spéciales et de la police générale ne peut pas s’exonérer de vigilance au nom de ce qu’une compétence de police serait locale. La transversalité des responsabilités a ainsi transcendé la règle de l’adéquation de ces dernières avec l’exercice des compétences.

 

Des inquiétudes collectives croissantes en matière de responsabilité civile au sens large.

 

Si les effets de la notion de faute personnelle non détachable du service pourraient rassurer les élus en tant que personne, l’augmentation du nombre et surtout des fondements des condamnations prononcées par les juridictions administratives ne peuvent que préoccuper les mêmes élus en qualité cette fois d’exécutif de leur collectivité.

 

Un élément personnel faussement rassurant : la faute non détachable du service :

 

La condamnation pénale avait normalement comme corollaire, en cas de constitution de partie civile, la condamnation « civile » personnelle de l’auteur de l’infraction : à la sanction pénale (peines d’emprisonnement, le plus souvent avec sursis, ou amende) s’ajoutait la crainte d’être condamné à de lourds dommages et intérêts. Ainsi  dans l’exemple de la Faute sur mer, le TGI des Sables d’Olonne, jugea qu’il « y aura donc lieu de déclarer leur constitution de partie civile recevable. », avec pour conséquence la condamnation du maire et de quatre élus ou agent impliqués, condamnés solidairement au paiement des dommages et intérêts. Compte tenu du nombre de victimes (47 morts et de très nombreux dégâts), la condamnation civile représentait plus de 3 millions d’euros à la charge des cinq condamnés.

Fort heureusement pour les personnes physiques condamnées, la cour d’appel de Poitiers (4 avril 2016)  infirma la compétence de l’ordre judiciaire en considérant que les appelants ayant soulevé « préalablement sur l’action civile une exception d’incompétence de la juridiction pénale au profit du juge administratif, qui a été jointe au fond », il  lui incombait de retenir cette exception d’incompétence en des termes très pédagogiques : « il est de principe que, même responsable pénalement, un élu ou un agent public n’a pas à répondre civilement devant le juge pénal ou civil des conséquences dommageables de l’infraction commise, des lors que les manquements retenus contre lui sont pas détachables de la mission de service public qu’il exerçait. Dans cette hypothèse, les juridictions de l’ordre judiciaire sont incompétentes pour connaître de l’action en réparation exercée par la victime de l’infraction et celle-ci doit porter son action devant la juridiction administrative, seules compétentes en vertu du principe de séparation des pouvoirs. La juridiction judiciaire ne retrouve sa compétence que lorsque la faute commise par l’élu ou le fonctionnaire et personnel et détachable du service.

Les fautes retenues contre (le maire) dans le cadre de l’action publique ont été commises dans l’exercice de ses fonctions de maire et avec les moyens du service.

Le fait qu’il s’agit de faute grave, qualifié au plan pénal, n’implique pas nécessairement de ce seul fait qu’elle soit personnelle et détachable du service »

En conséquence, la cour  dit « que les fautes retenues à l’encontre de… ne sont pas détachables du service public qu’il exerçait lorsqu’il les a commises ; et elle se déclare matériellement incompétente pour connaître de l’action civile à l’encontre de…Renvoie les parties à mieux se pourvoir devant la juridiction administrative compétente. »

Saisi par la partie la plus diligente (les victimes) , le  tribunal administratif de  Nantes[16]  admit cette compétence de l’ordre administratif[17].

 

D’un certain point de vue, cette convergence de vue entre cours d’appel judiciaires et tribunal administratif pour admettre le caractère non dépourvu de tout lien avec le service des fautes commises, est rassurante à titre personnel, pour les personnes physiques mais par une sorte de théorie des vases communicants, inquiétante pour les personnes morales de droit public au nom desquels les élus prennent des décisions.

 

Un élément inquiétant : l’augmentation du nombre de précédents de condamnation pour faute de police.

 

Une dernière idée reçue, cependant exacte dans un passé encore proche, était celle du faible nombre statistique des condamnations de l’Administration pour faute de police.

Or depuis quelques années, dans le domaine très sensible des préjudices «environnementaux » (au sens où c’est la modification de l’environnement, inondations, crues, Tsunami, tempêtes…qui sont à l’origine des contentieux) la responsabilité des collectivités publiques est de plus en plus souvent retenue.

La carence totale avait  très vite été considérée comme une faute engageant la responsabilité de la commune au travers de l’abstention de son maire[18]. La lecture attentive de  cet arrêt montre que déjà il y a presque 20 ans, en cas de carence totale la position du juge est sévère : inopérance d’enlèvements provisoire des déchets par la commune[19], refus de retenir le fait d’un tiers pourtant ayant aggravé le préjudice[20], charge de la preuve du préjudice inversée au détriment de la commune[21].

Mais deux jurisprudences récentes et remarquées allaient montrer l’inflation quantitative mais aussi qualitative des condamnations des personnes publiques.

 

L’exemple de Six Four la Plage :

Un couple était propriétaire d'une parcelle de 3 hectares située sur le territoire de la commune de Six-Fours-les-Plages (Var), dans le site classé du Cap Sicié. A plusieurs reprises, à compter de l'année 1990, les intéressés avaient été mis en demeure par le maire de la commune de procéder à l'enlèvement de dépôts non autorisés de déchets et de gravats sur leur terrain, puis en 1995 le maire leur a ordonné d'interrompre les travaux d'aménagement d'une voie de circulation d'une longueur de 200 mètres environ et de 5 mètres de large qu'ils avaient entrepris pour desservir leur parcelle.

S'estimant victimes de dépôts illicites émanant de tiers, ils ont déposé de nombreuses plaintes au cours des années 1990 à 2010 et ont adressé, le 21 décembre 2010, au maire de Six-Fours-les-Plages ainsi qu'au préfet du Var une demande tendant, d'une part, au versement de la somme de 1 182 652, 64 euros pour la remise en état naturel de leur terrain, d'autre part, à la mise en œuvre de mesures destinées à empêcher le dépôt sauvage de déchets et à poursuivre les auteurs identifiés de ces dépôts.

Leur demande ayant été rejetée, par la commune de Six-Fours-les-Plages et par le préfet du Var, ils saisissaient le tribunal administratif de Toulon d'une requête tendant à la condamnation de la commune de Six-Fours-les-Plages et de l'Etat en réparation des préjudices nés, selon eux, des fautes commises par le maire de Six-Fours-les-Plages et le préfet du Var à raison de leur abstention à faire usage des pouvoirs de police que leur confèrent le code général des collectivités territoriales, le code forestier ou encore le code de l'environnement au titre de la police des déchets.

Après rejet de leur requête par le tribunal administratif de Toulon ils interjetaient appel devant la Cour administrative d'appel de Marseille.

Dans un premier temps la Cour administrative d'appel de Marseille[22]  tout en rappelant le principe de la responsabilité communale et étatique par substitution en matière de police [23] avait confirmé le rejet de la responsabilité jugée par le tribunal administratif, à raison d’une faute exonératoire des victimes[24] et surtout en l’absence de faute de la police spéciale, faute ne pouvant être retenue qu’en cas d’erreur manifeste d’appréciation, absente en l’espèce[25] . Même exigence d’une erreur « manifeste » d’appréciation,  non constituée, dans le cadre cette fois des pouvoirs de police générale du maire[26]. Enfin la Cour administrative d'appel, dans une certaine cohérence (même dans l’erreur au regard de ce qu’allait juger le Conseil d’Etat) rejette la responsabilité de l’Etat pour non usage de sa faculté de substitution, s’agissant de déchets inertes, non constitutifs d’un danger grave et immédiat[27].

La Cour exonérait donc Commune et Préfet de toute responsabilité (« considérant qu’il s’ensuit que l’abstention du maire et du préfet du Var n’étant entachée d’aucune illégalité au titre des polices administratives susmentionnées, la responsabilité de la commune et de l’État ne saurait être engagée à ce titre ; »).

Cette affaire n’aurait pas défrayé la chronique si le Conseil d’état, en cassation, n’avait pas censuré pour erreur de droit le raisonnement tenu par le tribunal administratif de Toulon et la Cour administrative d'appel de Marseille, en un considérant lapidaire autant que clair :

«  Considérant que, s'agissant des déchets déposés dans le courant de l'année 2009, la cour a retenu que le refus de l'autorité titulaire du pouvoir de police de faire usage des pouvoirs que lui confère l'article L. 541-3 du code de l'environnement n'est illégal que s'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la gravité de l'atteinte portée à l'environnement et qu'en l'espèce le maire de Six-Fours-les-Plages n'avait pas commis d'illégalité et n'avait, par suite, pas engagé la responsabilité de la commune, en s'abstenant d'assurer aux frais des intéressés l'enlèvement des déchets dont les producteurs avaient pu être identifiés ; qu'en se bornant à rechercher si l'abstention du maire était entachée d'erreur manifeste, alors qu'il lui appartenait d'exercer un plein contrôle sur le respect de l'obligation définie au point 5 ci-dessus, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; »[28]

L’intérêt pédagogique de l’arrêt d’annulation est qu’il précise que ce n’est pas sur le terrain de l’erreur « manifeste » d’appréciation que l’on doit désormais se situer, mais bien celui, beaucoup plus facile à établir, de la simple erreur d’appréciation, non qualifiée de manifeste.

La suite de la jurisprudence et notamment l’affaire de La Faute-sur-mer allait monter toutes les conséquences du type de contrôle retenu. On se souvient que la cour d’appel de Poitiers avait renvoyé la question de la responsabilité « civile » à la compétence du juge administratif. Lors des trente et un jugements rendus le 12 février 2018, le tribunal administratif de Nantes appliqua le raisonnement défini par le conseil d’État dans l’affaire de la commune de Six fours les plages.

Au-delà du fait qu’ainsi huit ans après la tempête Xynthia, le tribunal administratif de Nantes ait condamné la commune de la Faute-sur-Mer, l’Etat et l’association syndicale en charge de l’entretien de la digue à indemniser les victimes, ce qui est exceptionnel c’est la quantité et la diversité des fondements juridiques des responsabilités publiques retenues en matière d’inondation et de carence à tous les niveaux de la responsabilité d’entretien et de police.

La lecture des jugements est édifiante[29]

La responsabilité de la commune de la Faute-sur-Mer est retenue du fait non seulement de la délivrance de permis de construire en infraction au Code de l’urbanisme, mais aussi défaut d’adoption d’un PCS (plan de secours ou de sauvegarde communal)[30] et d’information de la population[31].

Celle de l’Etat est engagée à la fois pour retard d’approbation du PPRI[32] et faute lourde de tutelle[33] .

Enfin, la commune[34], l’association syndicale de la vallée du Lay[35] (chargée des digues) et l’État sont tenus conjointement responsables du défaut d’exécution des travaux sur la digue Est.

Sujet discuté  le cas de force majeure est écarté[36], ainsi que de façon plus évidente l’idée d’une faute exonératoire des victimes[37].

Le tribunal administratif entend les responsabilités « publiques » comme solidaires[38], sans doute à raison du grand nombre de décès et de la gravité des préjudices  matériels. Même la partie « détachable » sans doute des fautes commises par les élus est éludée par le juge administratif, qui dans un souci de globalité de l’indemnisation renvoie éventuellement les personnes morales à une action récursoire contre les agents du fait de leurs fautes personnelles dépourvues de tout lien avec le service[39].

Cette extrême sévérité, tant dans le nombre de fondements de responsabilité que de celui des personnes morales responsables (commune, Etat, ASA), que dans leur diversité (faute simple, faute lourde de tutelle, défaut d’entretien, défaut d’information, défaut de prévention… est encore plus inquiétante lorsqu’on l’examine sur son esprit.

En effet, les fondements de la responsabilité sont larges (entretien, défaut de plans de prévention, de sauvegarde, carence de police) mais surtout sont calqués sur les fondements du contentieux de la légalité.

Ainsi, c’est l’appréciation de la légalité qui détermine la responsabilité, et il y a adéquation entre le raisonnement du juge de l’excès pouvoir (appréciation de la légalité) et celui du juge du plein contentieux (appréciation de la faute de nature à engager la responsabilité).

Cela n’est pas sans danger, car le juge de la légalité de la police administrative, notamment générale, intervient dans le cadre de ce que la doctrine a appelé contrôle «maximum », et surtout dans lequel existe un très grand pouvoir d’appréciation du juge.

Ainsi, une cour administrative d’appel  a pu considérer comme illégal un  usage excessif pouvoirs de police[40] , alors qu’une autre cour administrative d’appel avait sanctionné comme illégale l’absence d’utilisation de ses pouvoirs de police[41]

 

Dans le même esprit, la simple alerte ne suffit plus (pour une pollution des eaux par déversement[42]).

C’est donc bien d’une extension quantitative et qualitative des risques jurisprudentiels de condamnation des collectivités publiques, notamment, sujet de la présente étude, en matière de lutte contre les déchets et de dépollution, combinée avec le risque d’aggravation des conséquences des inondations, dont il faut parler.

À cette extension fondée sur la faute, il conviendrait pour être complet d’ajouter l’émergence, d’abord doctrinale puis relayée, comme c’est souvent le cas, par la jurisprudence, de l’idée d’une responsabilité sans faute cette fois, fondé sur la solidarité publique, et permettant l’indemnisation des victimes, même en l’absence de faute de l’autorité publique

En conclusion, les quatre idées reçues rassurantes respectivement de la limite de la responsabilité pénale à l’existence d’une infraction pénale caractérisée par un texte, de l’adéquation a priori entre compétence et responsabilité, du renvoi de la responsabilité « civile» au juge administratif, présumé bienveillant à l’égard des personnes publiques, ne résistent pas à la combinaison des préoccupations environnementales, des phénomènes climatiques et en particulier du risque d’inondation.

Comme souvent en droit la théorie est remise en question par la pratique.

Au cas particulier, si la théorie aurait pu permettre de rassurer les élus, tant au civil qu’au pénal, la pratique, notamment jurisprudentielle, devrait les inquiéter, ou à tout le moins les inciter à la prudence, vertu dont heureusement ils commencent précisément à cultiver la pratique.

 

[1] Principe développé par Cesare BECCARIA Des délits et des peines (1764).

[2] Loi du 13 mai 1996 et surtout du 10 juillet 2010 (Fauchon).

[3] « Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d'autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

En cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende. »

 

[4] « Le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende »

 

[5] TGI Chaumont 17 mai 1994 (n° 646/94 JurisData 1994.603242).

[6] TGI Rennes 9 février 1994 (n°540/94), confirmé par C.A RENNES 8 décembre 1994, Fauvel, n°1588-94).

[7] De nombreuses victimes des inondations du Var et de l’Aude ont dénoncé les négligences de ceux qui, ici, avaient oublié d’évacuer des monticules de roseaux coupés, là, avaient ignoré l’existence d’énormes dépôts sauvages. Les roseaux, entrainés par les flots, avaient obstrué les écoulements aménagés, les monceaux d’ordures avaient attaqué et détruit les digues.

 

[8] en pratique aujourd'hui, dans les communes littorales, les maires, sur avis des services de l'État, et après instruction des services des intercommunalité, refusent aujourd'hui très souvent les permis de construire demandés, en l'absence de surélévation substantielle ou de plans écartant l'habitation au rez-de-chaussée, même en  cas de délivrance antérieure d’un  permis d'aménager sur la zone et de réalisation en conséquences d’importants travaux d’aménagements réalisés sur cette base. Le juge administratif valide cette application (Voir par exemple  tribunal administratif de Caen, 25 septembre 2018, n°1800566) .

[9] In « Tintin au pays de l'or noir » HERGE ; Casterman 1950.

[10] Est considéré comme déchet « toute substance ou tout objet, plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il intention ou l’obligation de se défaire » (code de l’environnement, article L 541-1-1)

[11] I.-Lorsque des déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux prescriptions du présent chapitre et des règlements pris pour leur application, l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente avise le producteur ou détenteur de déchets des faits qui lui sont reprochés ainsi que des sanctions qu'il encourt et, après l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai d'un mois, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix, peut le mettre en demeure d'effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai déterminé. (Modifié par Ordonnance n°2012-34 du 11 janvier 2012 - art. 16)

[12] L2212-2-1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'éclairage, l'enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices et monuments funéraires menaçant ruine, l'interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autres parties des édifices qui puisse nuire par sa chute ou celle de rien jeter qui puisse endommager les passants ou causer des exhalaisons nuisibles ainsi que le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire, en quelque manière que ce soit, à la sûreté ou à la commodité du passage ou à la propreté des voies susmentionnées ;

 

[13] L2212-2-5° : « Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels, les maladies épidémiques ou contagieuses, les épizooties, de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu (…) »

[14] Article L2215-1

La police municipale est assurée par le maire, toutefois :

1° Le représentant de l'Etat dans le département peut prendre, pour toutes les communes du département ou plusieurs d'entre elles, et dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités municipales, toutes mesures relatives au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques. (…)

3° Le représentant de l'Etat dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l'ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d'application excède le territoire d'une commune ; »

 

[15] Conseil d’Etat 11 janvier 2007 requête 287 674)

« qu'à ce titre, l'article L. 541-3 confère à l'autorité investie des pouvoirs de police municipale la compétence pour prendre les mesures nécessaires pour assurer l'élimination des déchets dont l'abandon, le dépôt ou le traitement présentent de tels dangers ; que ces dispositions ne font toutefois pas obstacle à ce que le préfet, d'une part, en cas de carence de l'autorité municipale dans l'exercice des pouvoirs de police qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, prenne sur le fondement de celle-ci, à l'égard du producteur ou du détenteur des déchets, les mesures propres à prévenir toute atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement, d'autre part, lorsque les déchets sont issus de l'activité d'une installation classée pour la protection de l'environnement, exerce à l'encontre de l'exploitant ou du détenteur de celle-ci, pour assurer le respect de l'obligation de remise en état prévue par l'article 34-1 précité du décret du 21 septembre 1977, les compétences qu'il tire de l'article L. 514-1 du code de l'environnement ; »

 

[16] Tribunal administratif de Nantes  12 février 2018 dans 31 jugements (voir par exemple n° 1504909 et1700446)

[17] en « considérant  que présentent le caractère d’une faute personnelle détachable des fonctions de maire des faits qui révèlent des préoccupations d’ordre privé, qui procèdent d’un comportement incompatible avec les obligations qui s’imposent dans l’exercice de fonctions publiques ou qui, eu égard à leur nature et aux conditions dans lesquelles ils ont été commis, revêtent une particulière gravité ; qu’en revanche, ni la qualification retenue par le juge pénal ni le caractère intentionnel des faits retenus contre l’intéressé ne suffisent par eux-mêmes à regarder la faute commise par celui-ci comme étant détachable des fonctions, ou dépourvue de tout lien avec elle » ;

 

[18] Cour administrative d'appel de Douai 21 décembre 2000 requête n° 97DA01883. : « Considérant qu'il incombe au maire, chargé de la police municipale en vertu des dispositions de l'article L. 131-2 du code des communes alors en vigueur, repris à l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, d'assurer la salubrité publique ; qu'il appartenait ainsi au maire de la commune de Crépy-en-Valois de prendre les mesures nécessaires pour faire respecter la réglementation en vigueur sur les dépôts d'ordures ménagères et notamment d'interdire le dépôt constitué en dehors de toute autorisation administrative sur le chemin dont il s'agit ; qu'il est établi que le maire de la commune de Crépy-en-Valois n'a pris aucune des mesures propres à remédier aux nuisances engendrées par cette situation litigieuse sur la propriété de M. X... jusqu'à la création d'une déchetterie et la suppression corrélative dudit dépôt » ;(…); qu'ainsi, l'abstention du maire de Crépy-en-Valois à user de ses pouvoirs de police pour faire cesser les nuisances du dépôt sauvage d'ordures ménagères dont se plaignait M. X... a été constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune »

 

[19] « que le maire de Crépy-en-Valois ne saurait utilement se prévaloir de ce que la commune aurait fait procéder régulièrement à l'enlèvement des déchets illégalement entreposés et de ce que ce dépôt n'était que provisoire dans l'attente de la création d'une déchetterie pour justifier son inaction sur une aussi longue période » (ibidem)

[20] « Considérant que, contrairement à ce que soutient la commune de Crépy-en-Valois, l'existence même du dépôt sauvage d'ordures ménagères à proximité de la propriété de M. X... et les nuisances qu'il a entraînées résultant de l'abstention fautive du maire sont constitutifs d'une préjudice distinct de celui résultant du retard apporté par la société France Déchets à réaliser la rampe d'accès à la décharge contrôlée qu'elle exploitait » (ibidem)

 

[21] ; « que si la commune de Crépy-en-Valois soutient que l'indemnité mise à sa charge par le tribunal administratif est exagérée au motif que M. X... ne justifierait d'un préjudice que pour la période allant de la date d'introduction de la demande le 1er février 1993 devant le tribunal administratif jusqu'à la suppression du dépôt litigieux le 18 juillet 1994, la commune n'établit pas la réalité de son allégation et n'est dès lors pas fondée à demander une réduction de l'indemnité que le tribunal administratif a mise à sa charge » (ibidem)

 

[22] Cour administrative d'appel de Marseille, 15 décembre 2015, n°14MA00600.

[23] « 7. Considérant que l'autorité investie des pouvoirs de police municipale doit prendre les mesures nécessaires pour assurer l'élimination des déchets dont l'abandon, le dépôt ou le traitement présentent des dangers pour l'environnement ; qu'en cas de carence de l'autorité municipale dans l'exercice des pouvoirs de police qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, le préfet doit prendre sur le fondement de ces dispositions, à l'égard du producteur ou du détenteur des déchets, les mesures propres à prévenir toute atteinte à la santé, la sécurité publique ou l'environnement ; » (ibidem) »

 

[24] « qu'il résulte de l'ensemble de ces circonstances que les requérants ont fait preuve de négligence à l'égard des abandons de déchets sur leur terrain ; qu'ils devaient, par suite, être regardés comme détenteurs de ces déchets au sens de l'article L. 541-2 du code de l'environnement ; qu'en application de ces dispositions, la charge financière des travaux nécessaires à leur élimination reposait sur les époux B...eux-mêmes ; qu'ils ne sont, par suite, pas fondés à soutenir qu'en s'abstenant de faire usage des pouvoirs de police prévu à l'article L 541-3 du code de l'environnement le maire de Six-Fours-les-Plages ou le préfet du Var aurait commis une illégalité fautive à l'origine des préjudices alléguées à l'appui de leur demande indemnitaire ; » (ibidem)

 

[25] «  Considérant que l'abstention d'un maire à faire usage des pouvoirs que lui confère l'article L. 541-3 du code de l'environnement n'est entaché d'illégalité que lorsque l'état d'un terrain non bâti porte à l'environnement une atteinte d'une gravité telle qu'un refus serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'en l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction qu'en s'abstenant de faire usage des pouvoirs que lui confère cet article pour assurer aux frais de M. A... et de M. C...l'enlèvement des déchets dont le dépôt sur la parcelle de M. et Mme B... est de leur seul fait, le maire de Six-Fours-les-Plages aurait entaché d'erreur manifeste son appréciation sur les atteintes que l'état de cette parcelle était susceptible de porter à l'environnement, dès lors que les déchets déposés par les entrepreneurs de travaux en mars 2009 étaient constitués de gravats inertes et non dangereux et que leur enlèvement par leurs auteurs aurait, en tout état de cause, laissé subsister ceux déversés avant 2009 pendant près de vingt ans et dont il a été dit au point 8 que M. et Mme B...en étaient les détenteurs au sens de l'article L. 541-2 du code de l'environnement ; que l'abstention du maire n'est ainsi entachée d'aucune illégalité au titre de la police des déchets ; que, par suite, la responsabilité de la commune ne saurait être engagée à ce titre ; »

 

[26] « 13. Considérant que si ces dispositions autorisent le maire en cas de danger grave et imminent à faire usage des pouvoirs que lui confèrent les dispositions de l'article L. 2212-4 du code, si besoin est par des mesures d'exécution sur des propriétés privées exécutées par les soins de la commune et à ses frais, il ne résulte pas de l'instruction que les dépôts sur la propriété de M. et Mme B...aient constitué un danger grave et imminent nécessitant que le maire de Six-Fours-les-Plages fasse usage desdits pouvoirs ; (…) ; que, dès lors que le maire n'était pas tenu d'intervenir, les requérants ne sauraient reprocher au préfet de ne pas s'être substitué aux autorités municipales prétendument défaillantes »;

 

[27] « 13. Considérant que si ces dispositions autorisent le maire en cas de danger grave et imminent à faire usage des pouvoirs que lui confèrent les dispositions de l'article L. 2212-4 du code, si besoin est par des mesures d'exécution sur des propriétés privées exécutées par les soins de la commune et à ses frais, il ne résulte pas de l'instruction que les dépôts sur la propriété de M. et Mme B...aient constitué un danger grave et imminent nécessitant que le maire de Six-Fours-les-Plages fasse usage desdits pouvoirs ; (…)que, dès lors que le maire n'était pas tenu d'intervenir, les requérants ne sauraient reprocher au préfet de ne pas s'être substitué aux autorités municipales prétendument défaillantes » ; (ibidem)

 

[28] Conseil d’Etat 13 octobre 2017 n°397031.

 

[29] On prendra pour exemple, parmi les 31 jugements identiques rendus, le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 12 février  2018 Nos1504909, 1700446

 

[30] « 22. Considérant (…) que,  il résulte des constatations de faits auxquelles a procédé la cour d’appel de Poitiers dans son arrêt du 4 avril 2016 ayant acquis force de chose jugée et qui ont commandé la condamnation prononcée à l’encontre de M. V..., d’abord, qu’aucun plan de secours ou de sauvegarde communal n’a été élaboré par la commune de La Faute-sur-Mer, ensuite, que le maire, alors qu’il s’y était engagé, n’a pas adopté le diagnostic de vulnérabilité des habitations situées derrière la "digue Est", parmi lesquelles figurait celle des défunts, ce diagnostic constituant un préalable à l’engagement de travaux afin de réduire leur exposition aux risques d’inondations, et, enfin, que, le 27 février 2010, (…)que l’absence d’adoption d’un plan de secours ou de sauvegarde communal et du diagnostic de vulnérabilité ainsi que l’absence de diffusion auprès de la population de La Faute-sur-Mer, et notamment des occupants des habitations situées à proximité de la "digue Est", du risque d’inondations lié à la survenance de la tempête, constituent des fautes de nature à engager également la responsabilité de cette commune » ;

 

[31] « 18. Considérant que les constatations de faits auxquelles a procédé le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif de son arrêt ayant acquis force de chose jugée s'imposent au juge administratif ; qu’il résulte de l’instruction que, par son arrêt du 4 avril 2016 qui a acquis force de chose jugée en ce qu’il a statué sur l’action publique exercé à l’encontre de M.Q..., la chambre des appels correctionnels de la cour d’appel de Poitiers a condamné celui-ci à une peine de deux ans d’emprisonnement assortie d’un sursis aux motifs, en premier lieu, qu’il n’a pas informé l’ensemble de la population de sa commune, sur le territoire duquel avait été prescrit, depuis le 29 novembre 2001, l’élaboration d’un plan de prévention des risques d’inondations, des caractéristiques des risques d’inondations connus dans la commune, alors qu’il en avait connaissance, des mesures de prévention de ces risques et de sauvegarde, des modalités de l’alerte, de l’organisation des secours et des mesures de gestion du risque, ni par des réunions publiques ou tout autre moyen approprié, ni au travers du document d’information communal sur les risques majeurs prévu à l’article R. 125-1 du code de l’environnement, pris pour l’application de l’article L. 125-2 de ce code, alors que les services de la préfecture de la Vendée avaient mis à disposition de la population, à compter de la fin de l’année 2005, notamment par une mise en ligne sur son site internet, le dossier départemental des risques majeurs, dans sa version approuvée par arrêté préfectoral du 26 août 2005 ; que la méconnaissance de ces obligations d’information constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune »

 

[32] « 27. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la réalisation du plan de prévention des risques naturels d’inondations qui devait couvrir notamment le territoire de la commune de La Faute-sur-Mer, a été prescrite par arrêté préfectoral du 29 novembre 2001 ; qu’en dépit de l’application anticipée d’une partie des mesures envisagées dans le cadre de ce plan, décidée par arrêté préfectoral du 8 juin 2007, et de l’engagement de nouvelles consultations avec les maires des deux communes concernées sur un projet de plan de prévention des risques d’inondations renforcé à compter du 24 août 2009, il est constant qu’aucun plan de prévention n’avait été approuvé à la date du sinistre ; qu’il résulte de l’instruction que si cette absence d’approbation procède, pour l’essentiel, du refus de la commune de La Faute-sur-Mer d’accepter l’entrée en vigueur d’un tel plan, lequel limitait, selon elle à l’excès, les possibilités de constructions à usage d’habitation sur le territoire communal, les services de l’Etat n’ont pas exercé les diligences nécessaires pour son approbation définitive, eu égard à l’importance que représentait la mise en œuvre de ce plan, notamment pour l’information qu’il était susceptible d’apporter à la population s’agissant des risques d’inondations, même si ceux-ci avaient été minorés ; que le retard particulièrement important pris dans cette approbation ainsi que le recours à des données de référence erronées ayant contribué à minorer l’exposition au risque de submersion des terrains proches de la "digue Est", y compris en ce qui concerne les mesures de ce plan appliquées de manière anticipée, constituent des fautes de nature à engager la responsabilité de l’Etat »;

 

[33] « 36. Considérant qu’il résulte également de l’instruction que le préfet de la Vendée ne pouvait ignorer ou sous-estimer les difficultés inhérentes aux conditions, évoquées au point 30 du présent jugement, dans lesquelles la commune de La Faute-sur-Mer s’était substituée à l’association syndicale autorisée (…)", en qualité de maître d’ouvrage des travaux de confortement de la "digue Est", alors que, par ailleurs, les travaux de relèvement de la hauteur de cette digue étaient, ainsi que cela a été dit au point 32 de ce jugement, au nombre des missions de l’ASVL ; qu’il résulte encore de l’instruction que l’Etat n’a pas veillé à ce que soit assurée une coordination des actions éventuelles de la commune de La Faute-sur-Mer et de l’ASVL en ce qui concerne ces travaux ; qu’il résulte enfin de l’instruction que le préfet de la Vendée a autorisé, par son arrêté du 4 août 2009, la réalisation des travaux d’exhaussement de la "digue Est" tels qu’ils étaient envisagés par la commune, sans relever que le confortement du secteur D, dont le risque de submersion était connu des services de l’Etat, n’était pas concerné par ces travaux et qu’ils n’ont mis en œuvre aucune mesure de nature à en permettre l’exécution sur ce secteur ; que, dans ces circonstances, en ne faisant pas usage des pouvoirs qu’il tient des dispositions précitées de l’article 30 de l’ordonnance du 1er juillet 2004 et des articles 49 et 50 du décret du 3 mai 2006, l’Etat a commis une faute lourde dans l’exercice de ses pouvoirs de tutelle ; que, par suite, sa responsabilité doit être engagée à ce titre » ;

 

[34] « 15. Considérant que (…) la commune a méconnu son obligation d’entretien de cet ouvrage en n’ayant pas exécuté les travaux nécessaires au renforcement de sa fonction de protection, et en dernier lieu, qu’ont été méconnues les obligations d’information de la population le jour de la tempête et de surveillance de la "digue Est" durant la nuit de la tempête, en violation des dispositions du 5° de l’article L. 2212-2 et de l’article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales (…)

[35] « 32. Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 21 des statuts de l’association syndicale autorisée ()ns sa rédaction résultant de l’arrêté préfectoral du 24 novembre 2008 : « l'entretien, le terrassement, le renforcement, et l'exhaussement des digues de la rive droite du Lay maritime situé sur le territoire de La Faute assimilés à des ouvrages de défense contre la mer sont assurés par l'ASA dite "vallée du Lay" » ; qu’ainsi qu’il a été exposé au point 30 du présent jugement, il résulte de l’instruction que les travaux de relèvement de la hauteur des ouvrages de lutte contre la mer situés dans l’estuaire du Lay, et en particulier de la "digue Est", étaient au nombre des missions de l’ASVL ; qu’il ne résulte pas de ces dispositions, ni de celles de l’arrêté préfectoral du 7 juillet 2005 classant cette digue au nombre des ouvrages intéressant la sécurité civile, que sa participation à de tels travaux aurait été subordonnée à une demande de son propriétaire ou de la commune de La Faute-sur-Mer, agissant comme maître de cet ouvrage ; que, s’il est constant, ainsi qu’il a été dit, que la commune a pris en charge elle-même la réalisation de ces travaux, cette circonstance n’exonérait pas l’ASVL d’exécuter ses obligations statutaires en apportant son appui, soit technique, soit matériel, soit financier, au renforcement de l’ouvrage, eu égard notamment au manque de diligence dont a fait preuve la commune et au caractère insuffisant de ces travaux, limités au secteur E de la "digue Est" ; que, par suite, l’ASVL doit être regardée comme ayant commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; »

 

[36] « S’agissant de la force majeure ;

38. Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’inondation du territoire de la commune de La Faute-sur-Mer, dans la nuit du 27 au 28 février 2010, a résulté de l’action combinée de vents violents avec de puissantes rafales ayant atteint, sur le littoral, une vitesse de 160 kilomètres par heure, d’une pleine mer de vives eaux d’équinoxe avec un coefficient de 102 et d’un phénomène important de surcote, d’environ un mètre, correspondant à la différence entre le niveau de la marée prévue aux abords du littoral et le niveau réel de la marée observé ; qu’il résulte également de l’instruction, d’abord, que, ainsi que l’a relevé la cour d’appel de Poitiers dans son arrêt du 4 avril 2016 s’appuyant sur les conclusions "d’experts missionnés avant la tempête", la probabilité d’être exposée à une telle conjonction d’événements naturels s’élève à environ 4 % pour une personne ayant une durée de vie de 78 ans, ensuite, que, comme cela a été relevé au point 25 du présent jugement, le territoire de La Faute-sur-Mer a connu plusieurs épisodes de submersion marine, notamment, en mars 1928, en novembre 1940, en février 1941, en octobre et novembre 1960, ainsi qu’au cours de l’année 1989, enfin, que dès l’intervention du diagnostic réalisé sur cet ouvrage au mois de juillet 2006, le caractère insuffisant de la protection contre la mer assurée par la "digue Est" et, par suite, la nécessité de mieux garantir, par la réalisation de travaux d’accroissement de la hauteur de cet ouvrage, les zones urbanisées contre le risque de submersion marine, étaient connus des autorités publiques ; qu’eu égard à l’ensemble de ces éléments, et ainsi que l’a d’ailleurs relevé la cour d’appel de Poitiers dans son arrêt du 4 avril 2016, l’inondation d’une partie du territoire de La Faute-sur-Mer pendant la nuit du 27 au 28 février 2010 ne peut être regardée comme procédant d’un événement naturel présentant les caractères d’imprévisibilité et d’irrésistibilité lui conférant la nature d’un événement de force majeure »

 

[37] « S’agissant de l’existence d’une faute des victimes ;

39. Considérant que si feus les époux M...ne pouvaient ignorer la proximité de leur construction vis-à-vis du littoral, ils ont pu légitimement estimer qu’ils étaient suffisamment protégés contre un risque d’inondations par la présence de la "digue Est" ; (…) ; qu’en faisant édifier, en 1975, une construction à usage d’habitation dans une zone soumise à un risque d’inondations, dont l’aléa était connu d’eux de manière imparfaite et alors qu’ils ignoraient l’insuffisance de la hauteur de la "digue Est" et, par suite, son risque de défaillance dans sa fonction de protection, les victimes du sinistre à l’origine de l’action de Mmes F...et M...et de MM. M...ne peuvent être regardées comme ayant contribué à la survenance des dommages ; que, par suite, l’Etat, la commune de La Faute-sur-Mer et son assureur ne sont pas fondés à soutenir que les parents ou beaux-parents des requérants auraient commis une faute exonératoire, même partiellement, de leur responsabilité »;

 

[38] « En ce qui concerne le lien de causalité :

37. Considérant que, prises dans leur ensemble, les fautes relevées aux points 18, 22, 27, 31, 32 et 36 du présent jugement, commises par l’Etat, la commune de La Faute-sur-Mer et l’ASVL, ont été à l’origine directe de l’accident dont ont été victimes les parents ou beaux-parents des requérants ; que, dès lors, le lien de causalité entre ces fautes et les dommages causés doit être regardé comme établi ; que, par suite, les requérants sont fondés à rechercher la responsabilité in solidum de l’Etat, de la commune de La Faute-sur-Mer et de l’ASVL ; »

51. Considérant, d’autre part, que, compte tenu de l’incidence des fautes commises par l’Etat, la commune de La Faute-sur-Mer et l’ASVL qui ont concouru concomitamment à la survenance du sinistre, il sera fait une juste appréciation de leurs parts de responsabilité respectives en fixant celle de la commune à 50 %, celle de l’Etat à 35 % et celle de l’ASVL à 15 % ; qu’il y a lieu, dans ces conditions, de condamner l’Etat et l’ASVL à garantir la commune de La Faute-sur-Mer, à hauteur, respectivement, de 35 % et 15 % des condamnations prononcées à son encontre, de condamner la commune et l’ASVL à garantir l’Etat, à hauteur, respectivement, de 50 % et 15 %, des condamnations qui le concerne et de condamner l’Etat et la commune à garantir l’ASVL, à hauteur, respectivement, de 35 % et 50 %, des condamnations prononcées contre elle » ;

 

[39] S’agissant de l’existence des fautes exonératoires personnelles du maire et de l’adjointe au maire en charge de l’urbanisme de la commune de La Faute-sur-Mer

« 40. Considérant qu’il résulte de l’instruction que les faits commis par M. V...et MmeD..., en leur qualité respective de maire de La Faute-sur-Mer et d’adjointe au maire en charge de l’urbanisme, constituent des fautes personnelles, mais que, ainsi que cela résulte de ce qui a été dit au point 9 du présent jugement, ces fautes ne peuvent être regardées comme  étant détachables du service ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la commune de La Faute-sur-Mer, les agissements personnels du maire et de son adjointe ne sauraient faire obstacle à l’engagement de la responsabilité de la commune devant la juridiction administrative, sans préjudice de l’action récursoire que celle-ci pourrait, le cas échéant, exercer à l’encontre de M.... »

[40] Cour administrative d'appel de Versailles 10 mai 1017 Commune de Saint Chéron : « qu’il résulte de ces dispositions qu’en l’absence de péril imminent, le maire ne peut user que des pouvoirs et des procédures prévues par les articles précités du code de l’environnement pour ordonner des mesures d’élimination de déchets ; considérant qu’en l’espèce, s’il ressort des pièces du dossier que les sols pollués du lotissement représentaient des risques pour la santé principalement en cas d’ingestion accidentelle de terre ou d’ingestion des végétaux cultivés sur le site, le maire de la commune de Saint Chéron ne pouvait légalement, en l’absence d’urgence, faire usage de ces poires de police générale mais devait se conformer aux procédures prévues par le code de l’environnement et mettre en demeure les propriétaires de procéder à la dépollution de leur terrain avant de le cas échéant d’assurer d’office l’élimination des déchets aux frais des responsables ; qu’il suit de là que l’arrêté du 28 juillet 2000 du maire de la commune de Saint Chéron est entaché d’excès de pouvoir. »

 

[41] Cour administrative d'appel  de Bordeaux 16 janvier 2014 requête n°13BX00105 « .5. Considérant que la présence de matériaux combustibles, de matières plastiques et de nombreux véhicules à l'état d'épave, entreposés sur le terrain de M.C..., présente un risque de pollution des sols du fait des différents liquides et fluides contenus dans les organes des véhicules ; que la commune d'Ambès n'établit pas que son maire n'avait pas été alerté dès l'origine des troubles subis par les époux B...ainsi que de la nature des risques afférents à la présence de ce dépôt ; qu'en outre, le dépôt de déchets constitue un risque avéré d'incendie, (…) ; que, malgré la persistance de ce dépôt non autorisé, le maire d'Ambès s'est ainsi borné à faire dresser des procès-verbaux de contraventions, sans prendre d'autre mesure, telle que notamment l'édiction d'une mesure d'enlèvement de ces déchets, de nature à faire cesser ces troubles ; qu'au surplus, la circonstance alléguée que, par un courrier en date du 30 septembre 2009, le préfet ait précisé que l'activité de stockage de véhicules accidentés et de carcasses ne relevait pas de la nomenclature des installations classées, au sens du code de l'environnement, ne faisait pas obstacle à ce que le maire fasse usage de ses pouvoirs de police pour y mettre fin ; qu'ainsi, en refusant de faire usage de ses pouvoirs de police générale qu'il tient des dispositions précitées de l'article L. 2212-5 du code général des collectivités territoriales, le maire a entaché sa décision d'illégalité »

[42]Cour administrative d'appel de Lyon 10 juin 2010 08LY00621 : « Considérant qu'il résulte de l'instruction que la pollution par des germes pathogènes des eaux traversant la propriété est imputable au déversement, dans le ruisseau en cause, d'eaux usées en provenance du hameau des Chambards situé, sur la commune de Creuzier-le-Neuf, en amont des parcelles exploitées par M. A ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le maire de Creuzier-le-Neuf a été alerté, dès 1999, de cette pollution ; que, toutefois, en se bornant à prévenir la communauté d'agglomération de cet état de fait et à l'inciter à effectuer les travaux nécessaires pour y remédier, sans faire usage des pouvoirs de police de la salubrité qu'il détient de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, pour notamment interdire les rejets ou mettre en place un approvisionnement en eau alternatif, le maire de la commune de Creuzier-le-Neuf a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune » ;

Publié le 21 novembre 2019