Combinaison de la Question prioritaire de constitutionnalité et du renvoi préjudiciel

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Un ressortissant étranger, en séjour irrégulier en France, a fait l'objet d'un contrôle de police dans la zone frontalière franco-belge, en application de l'article 78-2, alinéa 4, du Code de procédure pénale. Le préfet du Nord lui a notifié un arrêté de reconduite à la frontière le 23 mars 2010, ainsi qu'une décision de maintien en rétention administrative.

Devant le Juge des libertés et de la détention, saisi d'une demande de prolongation de la rétention administrative, l'intéressé a déposé un mémoire posant la question prioritaire de constitutionalité suivante :

« L'article 78-2 al. 4 du CPP porte-t-il atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution [...] ? », « en ce que cette disposition autorise les contrôles d'identité à l'intérieur d'une zone de 20 km à partir des frontières françaises quoique intérieures à l'espace Schengen et ce nonobstant les dispositions du traité de Lisbonne ? » (http://www.courdecassation.fr)

Il soutenait que l'article 78-2, alinéa 4 du Code de procédure pénale, portait atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment l'article 88-1, aux termes duquel « La République participe à l'Union européenne constituée d'Etat qui ont choisi librement d'exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du Traité sur l'Union européenne et du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du Traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 ».

Il ajoutait que les engagements résultant du Traité de Lisbonne, incluant celui de la libre circulation des personnes prévu par son article 67, ont une valeur constitutionnelle au regard de l'article 88-1 précité et que partant l'article 78-2, alinéa 4 du Code de procédure pénale qui autorise des contrôles aux frontières de la France avec les autres Etats membres est contraire au principe de libre circulation des personnes posé par l'article 67 du Traité de Lisbonne, qui prévoit que l'Union assure l'absence de contrôles des personnes aux frontières intérieures.

La Cour de cassation, saisie de cette QPC, a considéré, dans un arrêt en date du 16 avril 2010, que « les juges du fond ne peuvent pas statuer sur la conventionalité d'une disposition légale avant de transmettre la question de constitutionnalité » au regard des dispositions de la loi organique du 10 décembre 2009, relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution relatif à la question de constitutionnalité et qu'ainsi « les juridictions du fond se voient privées par l'effet de la loi organique du 10 décembre 2009 de la possibilité de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne avant de transmettre la question de constitutionnalité ».

Aussi, estimant que la question prioritaire de constitutionnalité visait en réalité la conformité du droit français à la fois au droit de l'Union européenne et à la Constitution française, la Cour a décidé de poser à la Cour de justice les deux questions préjudicielles suivantes, conformément aux dispositions de l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ex article 234 du TCE) :

« - est-ce que la loi organique, qui impose aux juridictions nationales de se prononcer par priorité sur la transmission au Conseil constitutionnel de la question de constitutionnalité, est conforme à l'article 267 TFUE relatif au renvoi préjudiciel à la Cour de justice alors que l'inconstitutionnalité éventuelle, issue de l'article 88-1 de la Constitution, résulterait en réalité d'une contrariété avec le droit de l'Union européenne ?

- est-ce que le droit français (article 78-2, alinéa 4, du Code de procédure pénale) est contraire au droit de l'Union européenne (article 67 TFUE) ? » (http://www.lexisnexis.fr/depeches).

16_avril_2010qpc.pdf

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Publié le 04 mai 2010